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Les guerres d'Italie et la pensée politique : Florence au XVIe siècle (1494-1512), un laboratoire de la pensée politique moderne

Présentation du projet

 La coupure de 1494 avec l’arrivée des armées françaises de Charles VIII en Italie ouvre la période des « guerres d’Italie » qui va amener à l’affrontement de la France et de l’Espagne, et à la victoire de cette dernière entérinée par le traité du Câteau-Cambrésis en 1559 mais déjà acquise sur le sol italien en 1530.

Cette période de guerre entraîne une série de conséquences sur Florence. Quand les Médicis sont chassés en 1494, du fait de l’arrivée des troupes françaises, ce n’est pas la forme politique antérieure à leur présence à la tête de la cité qui est choisie, mais bien une forme inédite, la République du grand conseil.

Les événements guerriers (en particulier la menace que César Borgia fait courir à Florence) amènent aussi à la mise en place en 1502 d’une nouvelle forme institutionnelle : le gonfalonier est désormais à vie (alors qu’il changeait tous les deux mois). Les consultations des citoyens dans des pratiche qui réunissent parfois plusieurs centaines de personnes pour donner des avis et des conseils à la Seigneurie sont aussi à mettre en évidence.

Quand on considère globalement cette expérience, qui dure pourtant très peu de temps (de 1494 à 1512), on se rend compte de son incroyable vigueur et de son inventivité politique : les textes de Machiavel, l’Histoire d’Italie de Francesco Guicciardini en sont directement issus, leur circulation européenne commence et joue un rôle suffisamment grand pour qu’on ait parlé pour le premier de « naissance de la pensée politique moderne » et que l’histoire du second ait été présentée comme le renouveau de l’historiographie en Occident.

Ces pratiques et ces écritures politiques et historiques marquent une transformation de la pensée politique et partent donc d’un questionnement lié à la prégnance des événements. Il y a là une réflexion sur la conjoncture et sur les coupures de la temporalité historique qui ne va pas restée confinée à Florence, ni même à l’Italie. Les textes de Machiavel, mais aussi l’Histoire d’Italie de Francesco Guicciardini, vont être traduits et circuler dans toute l’Europe par l’intermédiaire de leurs traductions en latin et dans les langues vulgaires.

L’analyse des effets de cette circulation des textes et des idées « florentines » a des conséquences importantes dans la France des guerres de religion. L'acte de fondation de la polémique anti-machiavélienne en Europe est la publication, à Genève, de l'Anti-Machiavel du calviniste Innocent Gentillet en 1576 (souvent réédité dans les décennies suivantes et rapidement traduit). Le propos est d'autant plus violent qu'il existe en France une vraie pénétration de la pensée du Florentin, en particulier dans le parti des "politiques". L'anti-machiavélisme tend ici à se ramener à une critique classique de la tyrannie. Une modification se produit à partir de la fin du XVIe siècle avec la doctrine de la "raison d'Etat" élaborée dans l'Italie néo-tridentine par Giovanni Botero et son Della ragion di stato (1589) : conçue par ses défenseurs comme un instrument de lutte contre ces "politiques" qui ont une conception trop laïque du pouvoir d'Etat, elle est dénoncée par ses adversaires comme un simple travestissement des idées de Machiavel.