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Publié le 17 février 2021 | Mis à jour le 17 février 2021

La liberté d’expression en conflits

Revue des droits et libertés fondamentaux, décembre 2020 (chron. 78, 80, 84, 86)

Dossier coordonné par Pierre Auriel et Charles Girard

Publication: décembre 2020 

La liberté d’expression peut-elle entrer en conflit avec elle-même ? Comment les cas où l’expression des uns se heurte à l’expression des autres sont-ils caractérisés, prévenus, ou résolus par le droit ? Ce dossier porte sur les conflits « internes » à la liberté d’expression.

Dans les litiges les plus fréquemment étudiés, la liberté d’expression s’oppose clairement à d’autres droits individuels (à la réputation ou à la vie privée, par exemple) ou à divers intérêts sociaux (tels que l’ordre public ou la sûreté). Ces conflits sont résolus en mettant en balance plusieurs principes ou en les hiérarchisant. C’est généralement sous cet angle que les travaux consacrés à la liberté d’expression, en droit et en philosophie, s’attachent à préciser ou à justifier le statut, protégé ou non, de catégories de discours particulières : blasphème, pornographie, discours raciste, apologie du terrorisme, etc.

Mais certains litiges opposent l’expression des uns à l’expression des autres. Ils amènent les parties et le juge à envisager s’ils peuvent être, ou gagnent à être, présentés, sur le plan juridique, comme opposant plusieurs droits à la liberté d’expression. Dans ce cas, ils ne peuvent être résolus qu’en mettant en balance ou en hiérarchisant plusieurs principes qui soient relatifs à ce droit. Ces conflits internes sont principalement de trois types. Ils surviennent tout d’abord lorsque plusieurs individus ou groupes sont en concurrence pour acquérir des ressources rares permettant l’expression publique, en particulier l’accès aux forums publics – physiques ou médiatiques – assurant l’exposition la plus large. Ils apparaissent ensuite lorsque l’usage que certains font de leur liberté d’expression contribue à limiter l’usage que les autres peuvent en faire, notamment en les empêchant de prendre la parole dans un forum qu’ils entendent contrôler. Ils surgissent enfin lorsque l’expression d’individus est limitée par l’expression de l’entité collective à laquelle ils se trouvent appartenir, dans le cas par exemple des membres d’une association ou des fonctionnaires de l’État.

Sans prétendre à l’exhaustivité, ce dossier explore la variété de ces conflits et des raisonnements qu’ils suscitent, en s’attachant à des ordres juridiques variés, essentiellement nord-américains et européens. Il interroge les logiques qui amènent, devant différentes juridictions, à les interpréter ou non en termes d’opposition entre plusieurs libertés d’expression, ainsi que les méthodes qui orientent leur résolution juridique. Il éclaire ainsi les compréhensions plurielles de ce droit, de ses limites et de ses fondements. Les contributions réunies, qui émanent de juristes et philosophes, résultent des travaux collectifs conduits au sein du programme de recherche EGALIBEX (ANR JCJC 2018).

Ce dossier inclut les contributions suivantes :

Gwénaële Calvès (Université de Cergy-Pontoise) : « Interdiction de discriminer et conflits internes à la liberté d’expression. Actualité de la jurisprudence Hurley v. Irish-American Gay, Lesbian and Bisexual Group of Boston (Cour suprême des États-Unis, 1995) », RDLF 2020 chron. n°78
Pierre Auriel (Université Jean Moulin Lyon 3) et Mathilde Unger (Université de Strasbourg): « La modération par les plateformes porte-t-elle atteinte à la liberté d’expression ? Réflexions à partir des approches états-unienne (Zhang v Baidu.com, 2014) et italienne (Casapound contro Facebook, 2019) ». RDLF 2020 chron. n°80
Charles Girard (Université Jean Moulin Lyon 3) et Pierre Auriel (Université Jean Moulin Lyon 3), « Le pluralisme des médias, condition de la liberté d’expression ? À propos des arrêts VgT Gegen Tierfabriken(2001) et Animal Defenders International (2013) de la Cour européenne des droits de l’homme » RDLF 2020 chron. n°86
Thomas Hochmann (Université Paris Nanterre), « L’expression des ministres et le devoir de neutralité. À propos des arrêts Schwesig (2014), Wanka (2018) et Seehofer (2020) de la Cour constitutionnelle allemande ». RDLF 2020 chron. n°84
Alexandre Palanco (Université Catholique de Lyon), « Liberté d’expression et droit de réponse dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme : un conflit interne en trompe-l’œil ? Réflexions autour de l’arrêt Eker c. Turquie(2017) ».

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  • Éditeur
    Revue des droits et libertés fondamentaux