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Séminaire : "Actualité de René Thom"_17/01/2020

Le 17 janvier 2020

16h
Université Paris 7 – Diderot, 16 Rue Marguerite Duras, 75013 Paris Salle 888C – Bâtiment des Grands Moulins de Paris, 8e étage (à droite en sortant de l’ascenseur)

GÉOMORPHOLOGIE & MUSIQUE

TABLE RONDE 1 :
Philippe Martin (CNRS ESPACE, Université d’Avignon)
Benoit Virole (Psychanalyste à Paris)

POUR ASSISTER ONLINE


Philippe Martin

Pour une physique de la géographie. De Goethe à Thom en passant par Spengler. Questions de formes, d’attracteurs et de structures lévi straussiennes ou girardiennes en géographie

La question spécifique qui nous anime est celle de l’utilité sociale de la géographie, utilité sociale au regard du bien commun, utilité sociale pour l’employabilité actuelle et future des étudiants géographes, utilité sociale pour assoir le futur de la discipline au-delà de mantras aujourd’hui dépassés par l’histoire. Mais comment la penser ? Comment aborder cette difficile question ?

La réponse tient en une formule lapidaire : il faut fonder une physique de la géographie, il faut donner à la géographie une base physique, c’est-à-dire fondée sur des concepts issus des sciences formelles, des sciences de la complexité en particulier alors même que la géographie se définit depuis peu comme une science sociale, c’est-à-dire une science dans laquelle le récit est l’alpha et l’oméga de toute réflexion (Petitot J., 1998, 2000) et alors même qu’elle s’est largement défaite de la géographie physique lors du déploiement de la géographie dite théorique et quantitative (Martin Ph., 2018), laquelle a été quantitative, mais fort peu théorique.

Il est alors possible d’essayer d’articuler, à un fondement physique – adapté au projet de la géographie – basé sur la thermodynamique, la théorie des catastrophes et plus largement les sciences de la complexité, d’autres conceptions issues du champ de la philosophie pour l’essentiel qui ont été portées par des auteurs comme Goethe, Nietzsche, Spengler, Lévi-Strauss ou Girard, liste à laquelle d’autres noms pourraient être ajoutés, en particulier issus du structuralisme (Dosse F., 1992), mais pas que (Petitot J., 2004).

Il s’agit alors de faire converger des réflexions physiques et anthropiques en allant puiser dans le fond philosophique des notions, des pensées… qui sont en résonnance avec la base physique fondamentale, qui est irrécusable, mais qui a le défaut de sa spécificité, de son difficile rapport à l’homme, de sa problématique articulation avec son irrationalité parfois foncière, avec ses amours et ses passions, bref avec l’histoire humaine. A contrario, par définition, les systèmes philosophiques devraient intégrer ces dimensions humaines qui échappent aux modélisations formelles et il est donc intéressant et instructif de voir si, et comment, ces deux courants peuvent (ou non) converger dans le champ d’expérimentation que peut être la géographie à condition de la recentrer sur ce qui doit être son projet identitaire, à savoir la compréhension et la modélisation des formes, et surtout de la morphogénèse, c’est-à-dire des différences d’organisation distribuées dans l’étendue, dans l’espace géographique qui n’est qu’un assemblage, à comprendre, de formes formées ou en devenir sous un flux d’énergie.

Ceci est aujourd’hui une démarche assez banale après une sociologie physique (Galand S., 2012) et de multiples travaux économiques (Jie Li et al. 2019) et plus largement après une percolation des concepts des sciences de la complexité dans les sciences humaines et sociales en essayant d’éviter toutefois l’écueil du verbiage creux. Cela étant, il ne faudrait pas à nouveau, comme cela a été le cas avec le structuralisme (Dosse F., 1992) ou avec la question de l’environnement, que la géographie passe à côté de ce qui devrait être de plus en plus son futur au-delà d’une calculabilité, d’une digitalisation, portée techniquement par les SIG, et au-delà d’une modélisation prédictive qui n’est guère suffisante. Il faut comme l’a si souvent affirmé R. Thom (1993) pouvoir comprendre. Prédire n’est pas expliquer !



Benoit Virole

Le problème de la stabilité structurelle dans l’harmonie

L’harmonie est la science des relations entre les sons. Ces relations sont déterminées en partie par une base naturelle liée à l’existence des rapports mathématiques entre les fréquences des sons consonants et en partie par une acceptation esthétique variant selon les époques. L’histoire de l’harmonie, et donc l’histoire de la musique occidentale, peut se déchiffrer comme l’acceptation progressive des différents rapports harmoniques établis par les résonnances naturelles d’un son fondamental. Le discours musical, du moins dans sa dimension tonale, est construit sur l’opposition entre d’une part une position harmonique stable, l’accord de premier degré de la tonalité du fondamental - avec ses renversements et ses substituts - et d’autre part l’accord de dominante dont les rapports harmoniques internes sont instables. Le discours musical, la phrase mélodique, est ainsi sous-tendue par l’opposition paradigmatique entre deux pôles attractifs en compétition d’existence, la tonique et la dominante. La notion d’opposition entre attracteurs en compétition et la notion d’instabilité structurelle sont fortement suggestives pour un rapprochement avec la pensée catastrophiste. Existe-il des chemins obligés, modelés par un type de catastrophe élémentaire ou de concaténation de catastrophes, entre deux positions stables de la tonique ? L’instabilité de l’accord de dominante est il redevable d’une interprétation catastrophique? Quels sont les rapports entre l’instabilité harmonique et l’affect esthétique musical ? L’harmonie peut elle mettre au travail la question de l’organisation morphologique des phénomènes naturels et l’associer à la question de l’affect esthétique ? Nous étudierons ces questions en nous appuyant principalement sur trois ouvrages Le traité d’harmonie d’Arnold Schoenberg, le traité historique d’analyse harmonique de Jacques Chailley et l’anti-traité d’harmonie d’Eveline Andréani.


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